Rendement vs rentabilité en 2023

Rendement vs rentabilité en 2023

Par François Gillet | La Maison du Patrimoine

Nul doute qu’en 2023 les amoureux de la pierre auront de belles fenêtres de tout à saisir. Mais le marché, resté très dynamique en 2022, a déjà amorcé en 2023 une tendance nécessitant une bonne lecture pour qui veut optimiser son patrimoine immobilier. Rentabilité et rendement sont deux composantes donnant de premières indications.

« Je veux de la rentabilité », « il me faut du rendement ». Des expressions partagées par nombre d’investisseurs mais qui est souvent mal employées. Reprenons les fondamentaux.
En physique, Le rendement est la production évaluée par rapport à une norme. Transposé à l’immobilier, c’est le revenu locatif évalué par rapport au prix de revient. Donc pour viser un rendement intéressant, il faut soit un bon loyer, soit un prix d’achat agressif, ou un peu des deux.
En ce début d’année 2023, la plupart des acteurs majeurs de la gestion locative observent une forte demande des preneurs sur un marché en insuffisance. Le site Bien ici évoque une hausse de 50% de contacts par annonce et une baisse du volume de biens à louer de 30% (nous évoquerons la raison de ce repli un peu plus bas).

Mécaniquement cela aura tendance à voir les rendements locatifs augmenter. Le même site annonce une hausse des loyers de l’ordre de 7,5%. Au-delà de la demande locative, cette évolution est aussi dictée par des propriétaires ayant vu leurs charges flamber en 2022. Et si les loyers sont généralement indexés, l’indice de révision des loyers a augmenté de 4,24% entre le quatrième trimestre 2021 et le même trimestre de l’année 2022. Prêtez attention aux éventuelles plafonds indiqués dans vos baux !
Pourquoi cette hausse soudaine dans un contexte économique complexe ? L’une des principales raisons réside dans le fait qu’une partie des nouveaux candidats à la location revient du marché de l’accession bredouilles, n’ayant pas été suivis par leurs banques en raison de plusieurs facteurs dont le fameux taux d’usure. La baisse du pouvoir d’achat enfonçant le clou, nombre d’acheteurs ont dû se résigner à rester locataire, repoussant leurs projets. Bien sûr, les passoires thermiques impactent (encore raisonnablement) ce marché, les preneurs étant malgré tout très regardant quant aux qualités d’isolation et de consommation des logements.

Bonne nouvelle pour le rendement donc !

Mais dans le même temps, la baisse des volumes de transactions est censée mécaniquement porter un repli des prix, puisque moins d’acheteurs. Cela se ressentira plus significativement sur des biens dont le prix sera supérieur à 220-250 000 euros, les biens de valeur inférieure restant convoités par les investisseurs.

Alors rendement qui augmente, oui, mais c’est là qu’il convient d’intégrer le second volet de notre analyse portant cette fois ci sur la rentabilité. Cette dernière prend en compte le cout d’achat, les revenus, mais aussi et surtout le prix de revente (ou valeur estimée au moment de l’arbitrage). On peut observer un bien dont le propriétaire loueur verra le rendement augmenter, mais sa rentabilité baisser si le type de logement se situe dans les montants évoqués plus haut.

Acheteurs, plus que jamais les conditions de négociations de vos futurs investissements vont conditionner leurs futures rentabilités ! Soyez donc vigilants à entrer sur un marché dans de bonnes conditions, c’est encore et toujours l’adage numéro un en 2023 : pour bien revendre commençons par bien acheter.

Ceci concernant le marché de l’immobilier ancien, intéressons-nous à un autre marché fortement exposé aux aléas du moment : l’immobilier neuf. En effet, l’envolée des couts des matières premières a vu une montée franche des prix du neuf. Nous avons même observé pour la première fois depuis fort longtemps, une augmentation des grilles de prix de certains programmes en cours de commercialisation, le promoteur subissant une hausse des couts dont il ne peut souffrir seul. Nous ne parlons pas ici d’acteurs profitant d’une forte demande pour gonfler les prix de façon opportuniste, mais bien d’un phénomène conjoncturel subit.

Même combat, quel rendement, quelle rentabilité ? Dans l’immobilier résidentiel neuf, les investisseurs devraient profiter de la hausse de la demande locative. Mais à des conditions d’achat moins favorables, le rendement devrait rester flat sauf phénomène de micromarchés. Ceux s’étant orientés vers des dispositifs défiscalisant vont pouvoir doper ce rendement grâce à l’économie d’impôts qui selon nous, est à retenir dans tout calcul économique d’une opération immobilière.

Là où le bât blesse, c’est sur une rentabilité qui s’annonce plus périlleuse à valoriser dans le temps. Si le marché de l’ancien est en repli et que dans le même temps le neuf (qui devient ancien dès sa livraison) augmente, l’écart creusé symbolise des conditions de revente (et donc de rentabilité) bien moins prometteuses. Il va falloir prendre son mal en patience et conserver assurément son bien « neuf » à un horizon bien plus lointain, que nous estimons à 12-15 ans. Ce qui au demeurant reste logique pour un actif immobilier.

Il reste cependant quelques marchés neufs plus confidentiels sur lesquels les rendements proposés restent très attractifs. Notamment sur le marché de l’immobilier géré, dont les opérateurs majeurs ont depuis quelques années intégré certaines conditions favorables aux investisseurs. Flambée des charges de copropriété ? Soit, le bail commercial prévoira dans ses conditions de répartition de couts une prise en charge totale (parfois plafonnée) par l’exploitant :  on parle ici plus communément d’un bail triple net, sans charges de copropriétés, de travaux et de taxe foncière. Ainsi, ce que certains jugeront comme un rendement faible d’environ 4% (mais net) sera plus intéressant qu’un rendement brut d’une opération sur de l’immobilier classique à 5 ou même 6%, car déduction faite des charges, taxe foncière et de l’impôt* il se retrouvera à niveau du neuf, et même en dessous quand on intègre des frais de notaires à 8% dans l’ancien, et un peu plus de 3% dans le neuf.

Ainsi en EHPAD par exemple, le rendement (neuf ou ancien) peut donc être intéressant, et la valorisation ne dépendant pas du marché immobilier traditionnel (mais du rendement visé par les investisseurs), sa rentabilité peut également donner le sourire aux investisseurs choisissant cette solution.

Cela étant dit, il parait évident qu’il y’a encore une fenêtre de tir bien ouverte pour ceux qui voudront saisir des taux d’intérêts encore très attractifs, quoi qu’on en dise. Sur le marché locatif, pas d’achat coup de cœur, pensez long terme, et portez votre attention sur d’autres classes d’actifs (LMNP, déficit foncier…) que le marché traditionnel, ne serait-ce que pour diversifier votre patrimoine.

* en immobilier géré, le statut de loueur en meublé non professionnel permet aux loyers d’échapper totalement ou partiellement à la fiscalité.

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