Alors que Donald Trump pousse son « Big and Beautiful Bill » — un projet de loi de 1117 pages mêlant baisses d’impôts massives et priorités électorales — jusqu’au vote à une voix près à la Chambre des représentants, la planète financière retient son souffle. Objectif affiché : faire ratifier ce texte avant le 4 juillet. Coût estimé ? Jusqu’à 5 200 milliards de dollars sur 10 ans selon le Committee for a Responsible Federal Budget. De quoi alarmer les agences de notation : Moody’s abaisse la note souveraine américaine à AA1, emboîtant le pas à S&P et Fitch. Les marchés, eux, n’en font pas grand cas… en apparence.
Car les vrais signaux d’alerte s’étaient déjà déclenchés plus tôt. L’anxiété fiscale a fait fuir les investisseurs étrangers, affaibli les adjudications récentes et propulsé les taux à 30 ans au-dessus de 5 %. Le symbole est fort : certaines obligations privées, comme celles de Microsoft, s’échangent désormais à des taux plus bas que la dette d’État. Même le FMI s’en mêle, appelant à une maîtrise budgétaire urgente.
Dans ce contexte, la hausse des rendements longs s’explique notamment par le retour de la « prime de terme », longtemps comprimée par la politique non conventionnelle de la Fed. D’après le modèle de la Réserve fédérale de New York, elle frôle désormais 1 % sur le 10 ans.
Pour Pierre Pincemaille, secrétaire général de la Gestion chez DNCA Finance, la réaction du marché ressemble à un verdict sans appel. Les obligations souveraines américaines longue durée enregistrent leur pire performance annualisée depuis des décennies. Mais cette purge pourrait bien annoncer le retour d’un intérêt international… à condition que le Sénat et les banques centrales ne laissent pas cette bombe budgétaire sans réponse.
